LA SAISIE VAUT CONFISCATION

La loi introduit un nouvel article 131-21 au Code pénal relatif à la peine de confiscation :

"Sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi et avec possibilité pour un tiers titulaire d’un droit de propriété de présenter des observations, la confiscation des biens saisis au cours de la procédure est obligatoire lorsqu’ils ont servi ou étaient destinés à commettre l’infraction, ou qu’ils en sont l’objet ou le produit direct ou indirect. Cette confiscation n’a pas à être motivée, sauf si la juridiction décide spécialement de ne pas l’ordonner."

Conditions de confiscation obligatoire

  1. Biens concernés : Ceux ayant servi ou destinés à commettre l’infraction, ou qui en sont l’objet ou le produit direct/indirect (article 131-21, al. 4).

    Par exemple, un véhicule ayant été utilisé pour transporter des substances illicites ou un compte bancaire contenant des fonds issus d’activités criminelles peut être concerné.

  2. Biens saisis au cours de la procédure : La loi impose l’obligation de confisquer uniquement si les biens ont été saisis préalablement.

  3. Confiscation en nature : Seule la saisie en nature impose une confiscation. Une saisie en valeur ne génère pas cette obligation.

    Cette distinction vise à garantir que seuls les biens ayant une relation directe avec l’infraction soient concernés.

Dispense de motivation

  • La confiscation n’a pas à être motivée sauf en cas de décision de ne pas confisquer.

  • Une décision de dispense doit être « spécialement motivée » en fonction des circonstances de l’infraction et de la personnalité de l’auteur.

    Par exemple, un juge peut décider de ne pas confisquer un bien si cela entraîne des conséquences disproportionnées pour une famille.


LA CONFISCATION VAUT EXPULSION

Le dernier alinéa de l’article 131-21 prévoit que :

"La décision définitive de confiscation d'un bien immobilier constitue un titre d'expulsion à l'encontre du condamné et de tout occupant de son chef, sauf pour le titulaire de bonne foi d'une convention d'occupation ou de louage à titre onéreux."

Motivation obligatoire pour la confiscation immobilière

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 20 juin 2024, exige que le juge motive sa décision, qu’elle soit :

  1. De confisquer : La motivation est requise même pour un bien constitutif de l’infraction.

  2. De ne pas confisquer : Le juge doit motiver spécialement sa décision, en tenant compte des circonstances de l’infraction, de la personnalité de l’auteur, ainsi que de sa situation personnelle et familiale.

Particularités de l’expulsion

  • La confiscation d’un bien immobilier entraîne automatiquement l’expulsion des occupants sauf en cas de convention d’occupation à titre onéreux par une personne de bonne foi.

  • Cette mesure vise à éviter l’utilisation d’un bien immobilier comme refuge ou base d’opérations illicites tout en protégeant les droits des tiers de bonne foi.

Impact sur les droits des tiers

Un tiers de bonne foi ayant un droit légitime sur le bien peut présenter des observations pour éviter une confiscation injuste. Cette disposition vise à équilibrer les impératifs de justice et la protection des droits individuels.


Conclusion

La loi du 24 juin 2024 marque une évolution majeure dans la lutte contre la criminalité financière et patrimoniale. En renforçant les outils juridiques à disposition des juges, elle permet une répression plus efficace tout en prévoyant des garde-fous pour protéger les droits des tiers de bonne foi.

Fabien PEREZ
Avocat associé au Barreau de Marseille